Hanashi

Stars Align – Les Vertus d’une famille de cœur

Dès la diffusion de son premier épisode fin 2019, la série d’animation Stars Align s’est démarquée de la production globale par sa maturité et son réalisme. Présentée comme une histoire sportive, elle s’attache surtout à montrer le quotidien troublé de ses personnages, dans un style se rapprochant de Silent Voice ou March comes in like a lion. Mais malgré ses nombreuses qualités, Stars Align peine à trouver son public et reste bien trop méconnu. Il est temps d’y remédier !

Le sous-titre de la série :
« Even in an ever changing world, only the starlit sky will not change. »
« Dans un monde en constante évolution, seul le ciel étoilé ne changera pas. »

Tôma et Maki, les deux protagonistes.

Shinjô Tôma, capitaine de l’équipe de soft tennis1 de son collège, se démène pour empêcher la fermeture de son club, faute de succès en compétition. Lorsque son ami d’enfance, l’agile Katsuragi Maki, revient vivre dans le quartier, Tôma va tout faire pour le convaincre de les rejoindre, quitte à le payer pour ses services. Cet accord incongru va bouleverser l’équilibre de l’équipe et la vie de ses membres, une poignée d’adolescents à la dérive.

La structure de la série reprend celle des mangas sportifs, de l’initiation pour le débutant aux compétitions, en passant par les indispensables entraînements et la constitution des équipes (les élèves jouent en double). Mais ici, pas de match sur trois épisodes ou d’attaques surpuissantes. Le choix du soft tennis, un sport méconnu et peu spectaculaire pratiqué majoritairement par des collégiens, n’est pas un hasard. L’accent est plutôt mis sur les paires de joueurs et leurs interactions, leurs capacités à dialoguer et à se soutenir pour performer au mieux sur le court. Et pour parler de manière plus générale, à travers l’activité du club, l’intérêt de la série se place du côté des personnages et de leur émulation face à leurs camarades et les adultes qui les entourent.

Au début de l'histoire, ce n'est pas la grande joie au sein de l'équipe.Au début de l’histoire, ce n’est pas la grande entente au sein de l’équipe.

Et les adultes, parlons-en. Ce sont souvent les grands absents de ce type de série sportive, à l’exception d’un ou deux coachs. Leur présence ici est donc beaucoup plus flagrante. C’est à travers eux que se dévoile le véritable thème de la série : les défaillances familiales et leurs répercussions sur leurs enfants et leur vie sociale. Et de manière très réaliste, dans Stars Align, aucune famille n’est parfaite.

Chaque adolescent a son caractère propre, mais est également le fruit de son éducation et de son environnement, parfois compliqué. De l’affection mal exprimée aux sévices psychologiques, de la frustration à la violence physique la plus crue, les situations et leurs conséquences sont montrées frontalement, à travers une mise en scène épurée, centrée sur les émotions ressenties. Nous ne vous cachons pas que certaines scènes sont très dures, et ce dès le premier épisode.

Ni Maki ni les spectateurs ne sont épargnés par les violences domestiques.

Mais c’est précisément dans la description de ce quotidien émaillé de violence et de rires, de frustration et de réconfort que la qualité de la série se dévoile. Poussée par la détermination de leur capitaine et l’ingéniosité du nouvel arrivant, l’équipe discréditée va trouver un renouveau inattendu. Cette seconde chance devient, pour les membres de l’équipe, l’occasion de faire ressortir le meilleur d’eux-mêmes et de montrer leur valeur auprès de leurs amis, des autres élèves et de leurs famille.

Surtout, face à l’apathie ou la virulence de certains parents, le club devient un espace de soutien et de réconfort dans lequel même les squatteurs trouvent leur place ; un endroit dans lequel chacun peut continuer à croire en l’amitié, au plaisir et en ses efforts, le temps d’un entraînement ou d’un match. Pour ces adolescents encore immatures, la perpétuation de leur club prend alors des enjeux de survie émotionnelle, la préservation d’un refuge face à la brutalité de la réalité.

Le soutien permet à ces adolescents de s’en sortir.

Pour comprendre l’existence même de la série, il faut d’abord s’intéresser à son créateur : Kazuki Akane2. Après des années au poste de réalisateur sur de nombreuses séries fantasy, il souhaite développer une série d’animation originale, plus sincère et proche de son public, à travers le prisme des drames humains. Une de ces inspirations principales est le superbe film Stand by me de Rob Reiner (1986), racontant l’excursion improvisée de quatre jeunes ados dans les années 50 aux USA. Ce film est lui-même l’adaptation de la nouvelle Le Corps de Stephen King, un récit semi-autobiographique qui se distingue dans l’œuvre de l’écrivain par son réalisme.

Kazuki Akane a précisé lors d’une longue interview3 s’intéresser à l’adolescence, à cet âge particulier où les jeunes cherchent à s’émanciper tout en étant encore trop liés à leurs parents pour y parvenir. Il précise avoir intégré un double message dans la série. Aux adultes, il souhaite leur rappeler ce que c’est que d’être jeune, qu’eux aussi ont subi des traumatismes de la part des générations précédentes, même s’ils l’ont oublié depuis. Quand aux enfants et adolescents qui regardent la série, il veut leur expliquer qu’ils n’ont pas à se blâmer pour tout. Les adultes sont humains, faillibles, parfois, ils craquent et gueulent sur les plus jeunes sans qu’ils aient fait quoi que ce soit de mal. C’est quelque chose que chacun peut comprendre, quelque soit son âge.

Les professeurs aussi ont leurs problèmes.

Pour concevoir cette série aussi exigeante qu’ambitieuse, Kazuki Akane s’est entouré d’un personnel de qualité au sein du studio 8-Bit, comme Yûichi Takahashi en tant que chef animateur. Reprenant le chara-design original d’Itsuka, son style épuré bénéficie beaucoup de l’animation en 2D qui apporte une grande expressivité aux personnages. A noter également, le choix de recréer des court de tennis en 3D afin de positionner la caméra plus librement. Ce système permet des perspectives et des mouvements originaux, qui plongent le spectateur avec les personnages au cœur des matchs.

Le résultat est sans appel : la réalisation et l’animation bénéficient d’un soin impressionnant, jusque dans ses (très !) nombreuses scènes post-générique. Chaque élément est réfléchi, chaque plan a son importance, et la mise en scène des personnages est d’une finesse troublante. Même dans les séquences de groupe, en une seule image, chaque personnage va avoir sa réaction personnalisée, en fonction de son caractère et de son état d’esprit du moment ; un détail qui peut paraître anodin mais qui témoigne de l’attention portée à l’écriture du scénario et à la caractérisation des personnages.

Notez le réalisme du mouvement.
Découvrez d’autres extraits sur sakugabooru.com.

L’OST n’est pas en reste. Les musiques du groupe jizue soulignent avec justesse les émotions et apportent aux matchs un dynamisme surprenant. Enfin, il faut mentionner le générique de fin créé par Ryôma Ebata qui fit couler beaucoup d’encre4. Véritable hymne de la série, il conclut les épisodes avec sa joie de vivre, parfois en contre-pied total des derniers événements, comme pour nous rappeler que la vie continue malgré tout, envers et contre tout.

Il y aurait encore tant à dire sur cette série, tellement elle fourmille d’idées et de subtilités. Mais pour être honnête avec vous, il nous faut malheureusement aborder sa principale faiblesse, qui nous l’espèrons sera comblée un jour. Au début du projet, Kazuki Akane a écrit l’histoire de Stars Align en 24 épisodes, en accord avec ses producteurs. Mais seulement quelques mois avant la diffusion, on lui a imposé de réduire sa série à 12 épisodes. Tiraillé entre cette obligation éditoriale et sa vision d’artiste, l’auteur a fait le choix de garder son récit intact, dans l’espoir de pouvoir terminer sa série sur une prochaine saison. L’épisode 12 est donc un excellent milieu de série narratif, qui s’achève sur un redoutable cliffhanger, terriblement frustrant.

Bien conscient que de nombreux fans attendent la suite de l’histoire, Kazuki Akane a assuré que celle-ci serait diffusée un jour ou l’autre, de préférence lors d’une saison 2 à la télévision, sinon sous un autre format (roman ou manga). Depuis, un bonus sous forme de trailer a été diffusé sur YouTube, mais rien de concret n’a été annoncé encore concernant la suite. Une chose est sûre, au sein de l’équipe Hanashi, nous sommes nombreux à l’attendre avec impatience !

Mitsue et Yuta, deux personnages secondaires inoubliables.

1 : Le soft tennis est une variation du tennis qui se joue avec des balles souples en caoutchouc, qui peut se jouer en simple ou en double.
2 : Kazuki Akane a notamment réalisé Escaflowne et Heat Guy J. Stars Align est sa seconde série originale après Noein, une petite merveille de SF sortie en 2005.
3 : Vous pouvez retrouver l’interview complète de Kazuki Akane en japonais uniquement, publiée durant la diffusion de la série le 12 octobre 2019 : https://natalie.mu/comic/pp/hoshiai
4 : Durant la diffusion, plusieurs danseurs ont accusé Ryôma Ebata de copier leur danse sans leur autorisation. Si l’affaire a été réglée en interne, ce fut une mauvaise pub pour la série.

Article écrit à quatre mains avec le génial Dareen.

Titre : Stars Align
Titre VO : 星合の空 / hoshiai no sora
Réalisation : Kazuki Akane
Scénario : Kazuki Akane
Musique : jizue
Studio : 8-Bit
Genres : Drame, Tranche de vie, Sport
Distributeur : Wakanim
Durée : 12 épisodes de 24 minutes
Première diffusion : 10 octobre 2019
Synopsis :
Le club de tennis du lycée est sur le point de fermer ! Qu’à cela ne tienne, Tôma Shinjô demande à Maki Katsuragi, un jeune prometteur, de rejoindre l’équipe afin de participer au championnat d’été. Ce dernier accepte, à la condition d’être rémunéré…

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